Réflexions sur l’immortalité

De nos ténèbres montent parfois des lueurs de notre Immortalité. Et

quoiqu’elles s’infusent, pour ainsi dire en nous insensiblement, tellement elles sont peu bruyantes et dépourvues de solennité, leur lumière cependant nous porte à croire que nous vivrons toujours…

Pourtant beaucoup en doutent. L’incertitude est notre ennemie. Elle

nous rend infranchissable la barrière que la Matière construit en nous entre la nuit de nos ténèbres et le jour de la Lumière. Si nous dominions ce doute, cette révélation nous sortirait de nos nuages intimes pour briller comme les éclairs qui paraissent et disparaissent, nous illuminant de leur Lumière. Mais le choc a été donné, ce choc vibratoire qui touche notre intelligence et tout notre être. La Connaissance s’est montrée telle une fée bienfaisante et merveilleuse qui nous couvre de ses ailes légères comme celle des Anges. Elle a mis en notre esprit, en notre cœur une flamme dévorante qui s’éveille, flambe et nous éblouit, si nous savons vivre comme il le faut, c’est-à-dire si nous cherchons à plaire à Dieu. Alors un soleil se lève dans notre nuit ; la vie s’offre dans son visage supérieur, dans sa force même, divine pour certains, et nous métamorphose à tel point que nous devenons d’autres êtres.

Moments pathétiques où l’homme vit comme par un autre lui-même.

Comment cela se produit-il ? C’est simple. Le Génie divin, le Génie de Dieu s’offre toujours dans une simplicité incomparable. Il nous a envoyé son fils, le Christ. Que voulait dire son Auguste Venue ? Qu’il fallait Le contempler, l’Aimer, Le suivre, qu’il fallait mettre nos pas sur Ses Pas divins ; pour tout dire qu’il fallait nous saigner matériellement pour avoir la richesse d’un autre sang qui ne serait pas celui de la Terre mais Celui des Cieux.

Le Christ n’a pas gravé autre chose sur le front changeant de l’Humanité. Cependant si Sa Voix grandit, puisque les hommes parlent encore de Ses Enseignements, de Ses Miracles, de Ses Prodiges, leur foi s’est arrêtée dans ses élans parce qu’ils ont la faiblesse de rester ce qu’ils sont, au lieu de se combattre pour être ce qu’ils devraient être. Mais la Voix du Christ monte, plane toujours immortelle et tellement céleste qu’elle pénètrera jusqu’au cœur de la Terre, gouvernera tous les peuples et ce sera demain.

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Deux rives s’opposent dans la Vie ; celle du Cœur et celle de la Matière.

Nous vivons actuellement sur la rive matérielle sans nous diriger vers celle du cœur que nous devrions choisir en premier lieu, car elle est celle de l’apaisement, de la fraternité et de l’amour idéal ; la seconde, la rive matérielle, nous ne devrions la prendre que pour aller à la première, en nous détachant de nos égoïsmes et de nos bas instincts. Nous n’avons pas encore compris que nous nous perdions un peu plus chaque jour en délaissant le côté de nos sentiments magnanimes. Nous avons sacrifié la rive qui devait être pleine de joie, de fraternité et d’espérance à celle où les plus vilains défauts et les plus cruelles déceptions affligent notre société et nous-mêmes.

Cependant, nous avons en nous un foyer éblouissant de Lumière ne cherchant qu’à se fondre dans notre esprit, dans nos regards, dans nos paroles, à nous éclairer de grandiose manière dans toute notre vie. Mais ce foyer, nous l’éteignons un peu plus chaque jour car lieu de monter plus haut, encore plus haut par nos œuvres quotidiennes, nous nous abaissons toujours un peu plus bas. D’une nuit aussi profonde comment voir la radieuse étoile de notre immortalité ?

C’est pourquoi, nous nous sommes dit et nous nous disons « l’immortalité, nous ne pouvons la concevoir » comme si ce terme était d’une ambiguïté telle que nous soyons dans l’impossibilité de discerner ce qu’il cache d’immortel.

Maintenant, si vous le voulez, descendons-en nous-mêmes, livrons-nous à une introspection des plus hardies, sans doute, mais des plus sincères dans la spiritualité que nous allons toucher.

Et je reviens alors à cette vérité : le Divin est en nous, le Divin se montre dans la nature, le Divin est dans les choses impondérables ; il s’éploie autant en nous-mêmes certains jours, que dans les levers majestueux du soleil, dans les couchers pleins de repos des soirs et dans les rêves si purs, si enveloppante de la solitude qui nous rapprochent de Dieu.

2

La Beauté de la Terre, nous la négligeons ou ne la sentons pas. L’artiste, parfois la saisit. Mais est-il de taille à en trouver la substance, à en faire des gammes mélodieuses soit avec sa musique, soit avec son pinceau, soit avec sa plume, soit avec son ciseau ? Bien souvent, il cherche à ne plus être l’artiste qu’il est, mais à plaire au public qui regarde l’art avec ses yeux vides, c’est-à-dire qui ne le comprend pas. L’artiste, s’il le voulait deviendrait un dieu par la beauté de ses œuvres, mais il reste un incapable parce qu’il n’est pas lui-même, qu’il a voulu être par les autres et pour les autres. Pour s’être mis à leur niveau, il s’est dépouillé de lui-même et ne sera pas ce qu’il aurait dû être pour le Bien de ses semblables.

Quand on parle de l’art, il s’agit toujours de Dieu, Dieu étant le Grand Artiste. Car puisque les hommes ont le sens de l’Art, ils en ont hérité

de très haut dans l’Infini des choses. L’artiste donc, s’il veut, sur ses frères, avoir la puissance qui les rendra meilleurs, doit donner des

impressions qui ne sont pas de la Terre, bien que puisées dans les Beautés mêmes de notre Globe, où resplendit si souvent le Divin avec une Grandeur saisissante. C’est son devoir. En agissant ainsi, il répandra une sorte de vérité par la beauté de ses œuvres, beauté idéalisée qui portera l’esprit du monde à concevoir au-dessus de la terre. C’est dans le rêve que l’artiste ajuste sa pensée avec l’inconnaissable dont il a des impressions pour frapper le profane, l’emporter par delà les murailles matérielles de ce monde, lui faire sentir et imaginer une vie autre que celle dans laquelle il naît et meurt trop souvent sans espoir. Ajoutez à cela la puissance de la Croyance et de la Foi. Non pas la croyance basée sur des choses inexplicables, mais la croyance raisonnée, celle qui satisfait le cœur et la raison, en un mot, qui élève la créature au-dessus d’elle-même, la fait vibrer par des liens immatériels qui se réveillent et font d’elle un être nouveau.

L’Art et les religions bien compris et bien observés feraient de l’homme matériel un autre homme qui non seulement serait l’homme de demain, mais celui, si je puis m’exprimer ainsi, de l’Infini. Car il ne stagnerait plus dans la mer des incompréhension où nous nous perdons, mais se délecterait dans les eaux claires de la Lumière, la Fontaine des Anges. Alors, dans ce domaine inconnu jusqu’ici à l’homme, une puissance en lui serait née, et le dominerait. Et comme si le Ciel était descendu en son esprit il aurait des gages de son Immortalité. Alors quelle joie et quelle espérance dans son cœur !

Peut-on croire un seul instant que Dieu n’ait pas semé sur tous les mondes dignes de ce terme un grain merveilleux, une perle éclatante de l’Immortalité. Si nous avons en nous l’âme prodigieuse de révélation par son essence divine, dans les beautés dont Dieu a doté notre globe, n’y-a-t-il pas, parmi les choses impondérables émanant d’elles, comme des Prières qui s’élèvent et s’envolent très haut, et qui sont, si je puis dire, des promesses de notre Immortalité. Que de fois pouvons-nous sentir ces promesses nous pénétrer de leur douceur et d’une joie divines presqu’ infinies.

Si donc nous résumons ces quelques pages, nous sommes persuadés par un raisonnement simple et cohérent que l’Immortalité si, en nous, nous la possédons par notre état divin, l’âme, et par nos œuvres idéales, nous l’avons autour de nous par les Beautés de la Nature puisque toutes viennent de Dieu.

Oui, l’âme par sa divinité, et les sentiments inspirés par la Nature, nous élèvent au-dessus de nous-mêmes, nous parlent de notre Immortalité. A ceux qui sont désignés par leur esprit, de le faire sentir

au monde par leurs œuvres, de travailler pour toucher ce but. Qu’ils soient à leur manière, les pionniers de l’Ere Nouvelle.

Hélas, nous avons tout corrompu. Nous avons molesté les arts, matérialisé les religions, source divine de la Beauté et qui mènent aux plus hautes vertus quand les Arts sont purs, sont saints et quand les

religions qui ne sont pas de la Terre mais des Cieux, portent l’homme au-dessus de ce monde. La Beauté doit régner ici-bas. Car l’Art pour être saint et pour être profitable à la société humaine, doit être beau de vertu dans ses élans irrésistibles qui soulèvent l’esprit du contemplateur au-dessus de lui-même, l’invitent à s’arrêter à tout ce qui est de Dieu, où il trouve la quasi-certitude, radieuse d’Espérance, qu’il est dans la Vérité et que la Vérité est éternelle.

Oui la Beauté répandue, criée et jamais décriée, acceptée comme une nourriture spirituelle nécessaire à notre existence, nous dégagerait de ce qui est laid ; ce serait une habitude contractée par la culture du beau, et les religions y gagneraient en puissance et en foi, car l’homme éduqué en ce sens, et toutes manières, serait prêt à accepter facilement le surnaturel.

Nous vivons dans un cercle infernal où la Beauté est absente, quand véritablement si nous touchons son lit céleste, celui de l’âme, nous devons avec l’aide de l’Art et des religions portés au plus haut de leur signification divine, croire à notre Immortalité.

Pensons à notre Immortalité. Ne disons pas qu’elle est impensable mais simplement que nous n’y songeons pas parce que nous ne sommes pas préparés à l’admettre.

La vie a toujours été. On ne peut lui attribuer un commencement. Nous sommes donc nés de l’Infini, Lui, la vie organisée de toujours et qui mène à Dieu.

Nous vivrons toujours. Pouvons-nous logiquement concevoir quelque chose de plus vrai ? Si la vie est seulement une accumulation de métamorphoses matérielles, nous ne sommes pas à l’image de Dieu qui est Esprit. Il nous est alors impossible de croire à notre Immortalité. Mais c’est la Vie de l’Esprit, la Vie de notre âme qui nous apporte la certitude que nous vivrons à jamais. Nous n’avons qu’à cultiver cette vie, par la Beauté, l’Idéal, pour ouïr cette certitude parlant en nous comme la Voix de la conscience.

Rejetons loin de nous l’interprétation de la vie limitée à la mort. Le sens profond de nous-mêmes nous y convie. Nous nous défendons par une sorte de force intérieure et impérieuse de penser autrement. La conception de la Matière est pour les êtres matériels ; pour eux, le seul habitat est la Terre. Mais pour l’homme qui a dépassé l’homme tout court, cette conception ne vient pas à son esprit, elle ne l’effleure même pas. Il vit par l’esprit, même avant l’heure de son Immortalité ; il en vit comme du bienfait de tout l’ensemble d’un monde caché au fond de lui-même qui a besoin de ce sentiment supérieur, de ce sentiment de vie impérissable. Sans quoi, tout s’éteint en lui comme s’il avait perdu tout à coup ce besoin de vie jamais rassasié, jamais

assez grand et qui caractérise son Immortalité.

L’immortalité est en nous, nous n’avons qu’à suivre le Christ, Lui, la Beauté sur toutes ses faces, pour en être persuadés. Elle est la plénitude de notre vie en ce monde. Quand nous vivons par l’âme, elle nous conduit souriants, passionnés du divin, à Dieu qui nous a crées pour vivre à jamais.

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